Toutes les entreprises ont des bénéfices cachés. En améliorant leur stratégie de prix, ces bénéfices pourraient être révélés. Ces nouveaux fonds pourraient même servir à établir de nouvelles voies de croissance.
Cependant, développer une stratégie de prix efficace n’est pas toujours facile. On se demande parfois s’il faut réellement regarder dans une boule de cristal pour deviner quel prix correspond à un produit.
Regardons plutôt dans la direction du value-based pricing (ou prix basés sur la valeur) qui nous mènera vers les bénéfices cachés et les voies de croissance annexes.
La plupart des entreprises décident de baser les prix des produits sur leurs coûts. On sait pourtant, en tant que consommateurs nous-même, que l’on ne pense pas au prix de production d’un article. C’est cher, ou ça ne l’est pas. Ce jugement n’est en fait pas déterminé seulement par le prix d’un produit, mais par sa valeur.
Si l’on vous propose un bout de bois à 100€ ou un lingot d’or à 100€ ; le choix est vite fait n’est-ce pas ? Maintenant, proposons à un client un t-shirt à 100€ ou des tickets de concert à 100€. Et si le t-shirt est un vintage extrêmement rare et le concert est celui d’un artiste que vous n’aimez pas particulièrement ? Le choix ne repose pas sur l’argent dépensé mais bien sur la valeur perçue par le client. Ce qui explique également pourquoi beaucoup choisiront différemment.
Ce qui change ce sont les bénéfices découverts grâce aux prix fixés sur la valeur. Pour tous les produits qui “partent comme des petits pains” : s’ils sont vendus actuellement à 15€ et que l’on découvre que les clients paieraient tout aussi bien 20€ pour l’acheter, ces 5€ de différence sont des bénéfices cachés.
Prenons un exemple d’entreprise ayant découvert ses bénéfices cachés. L’entreprise mondiale de fabrication Emerson Electric a mis en place une stratégie de prix basée sur la valeur. Jerry Bernstein, directeur de l’équipe d’amélioration des prix d’Emerson, a décrit l’ancienne stratégie de pricing comme suit : « On développe un produit, on regarde ses coûts et on se dit « Je dois faire un bénéfice de X ». On définit le prix en conséquence – et les gens l’achètent. ». À la fin des années 90, la société a changé ses prix pour se concentrer sur la valeur que les clients accordent à ses produits. Cette nouvelle perspective a immédiatement découvert des bénéfices cachés.
La filiale d’Emerson (Fisher-Rosemount) qui fabriquait des appareils de mesure a bénéficié de cette nouvelle méthode. L’entreprise avait développé un nouveau capteur qui mesurait les débits de fluide pour éviter l’éclatement des canalisations ou pour assurer que les mélanges avaient les bonnes proportions dans les usines de production chimique. En utilisant son ancienne stratégie de coût majoré, ces capteurs auraient été vendus au prix de 2 650 $. Après avoir discuté de la valeur de ce nouveau produit (par exemple, une meilleure précision et une taille plus petite par rapport aux concurrents) avec les États-Unis et les clients européens, l’équipe de pricing d’Emerson a découvert que les clients étaient prêts à payer plus que ce qu’ils avaient prévu de facturer.
En outre, ils ont constaté que les clients étaient très friands de la marque Fisher-Rosemount et étaient donc prêts à payer plus pour ce nom. En raison de ces facteurs, le prix final a été fixé à 3 150 $ et la société a estimé que les bénéfices étaient maximisés. Si un prix inférieur avait été fixé, Fisher-Rosemount aurait perdu des bénéfices sur chaque vente.
Pour la plupart, repenser ses prix sur la base de leur valeur ouvre déjà des opportunités d’augmentation des profits et de croissance. En revanche, il faut reconnaître quelques exceptions à cette stratégie. Certaines situations demandent de privilégier la stratégie globale de l’entreprise ou l’équité, auxquels cas les prix basés sur la valeur doivent être tempérés.
Dans le cas de l’équité, augmenter ses prix pendant ou après un désastre naturel par exemple : au mieux c’est moralement douteux et au pire, c’est direction la prison sans passer par la case départ. En tous cas, c’est souvent dans ces situations qu’on s’aperçoit que la valeur de certains produits passent en situation de pouvoir et deviennent des “produits à avoir”. Même si une entreprise obtient ce pouvoir, le choix d’augmenter ou non ses prix doit faire l’objet d’une réflexion.
Il est clair qu’en tant que société on ne se soucie pas particulièrement du prix du “produit à avoir” lorsqu’il s’agit du dernier accessoire à la mode pour les adolescents. En revanche, c’est plus problématique lorsqu’il s’agit d’un produit nécessaire à la survie. Après un désastre naturel, les clients seront prêts à payer n’importe quoi pour avoir accès à de la nourriture, de l’eau ou un abri. C’est des cas comme celui-ci par exemple, que l’on regretterait fortement de voir les entreprises augmenter leurs prix.
La concurrence affecte également la valeur. Si mon produit ne propose pas de grande différenciation par rapport à sa concurrence, le prochain critère examiné sera certainement celui du prix. Si les alternatives sont de qualité équivalente et à moindre prix, il est quasiment certain que le client se dirigera vers le moins cher.
On peut également décider qu’il s’agit d’une opportunité si les alternatives sont moins chères mais aussi de moindre qualité et se placer en tant que produit premium. Il est dans tous les cas important de considérer les alternatives à mon produit, avant de fixer son prix.
Il est également important de ne pas perdre de vue la vision globale des bénéfices.
Malgré une demande écrasante, Sony n’a jamais cédé à la tentation d’augmenter les prix
sur sa console de jeu vidéo PlayStation 2. Les pénuries d’approvisionnement ont commencé avec le déploiement de la PlayStation 2 en octobre 2000. Sony a annoncé qu’en raison de
problèmes de production, il n’allait vendre que la moitié du million d’unités qu’il avait promis de sortir aux États-Unis. Cette annonce a créé une frénésie d’achat parmi les clients désireux d’acheter la console, devenue le cadeau incontournable pour la saison des fêtes de cette année.
Malgré la possibilité d’augmenter les prix dans ce contexte de forte demande/faible offre, Sony a maintenu son prix de vente suggéré de 299 $. En conséquence, des particuliers ont commencé à revendre leurs consoles durement acquises sur des sites d’enchères comme eBay ou AuctionWatch.com (fonctionnant maintenant sous le nom de Vendio). Lorsque la PlayStation 2 est sortie, son prix de vente moyen sur les sites d’enchères était de 950 $. À la mi-décembre, une fois la demande initiale satisfaite et que l’offre avait augmenté, le prix moyen de vente aux enchères était de 445 $ soit encore bien au-dessus du prix de vente de Sony.
Pourquoi Sony n’a-t-il pas augmenté ses prix face à cette énorme demande ? Et bien la PlayStation 2 n’était en fait qu’un composant des bénéfices de Sony. Les ventes de la PlayStation 2 mèneraient à l’avenir aux revenus des ventes de jeux individuels. Lors de son lancement, Sony disposait d’une brève fenêtre d’opportunité dans laquelle il était le seul fournisseur de console de jeux vidéo aussi avancée. La concurrence de la Xbox de Microsoft et de la GameCube de Nintendo étaient à l’horizon.
Sony voulait donc capitaliser sur son avance en vendant autant de PlayStation 2 que possible avant que ses rivaux n’envahissent le marché. Si Sony avait fixé une valeur plus élevée, ce prix aurait été ancré dans l’esprit des consommateurs. Combien de fois avez-vous fait face à un prix élevé et avez-vous décidé que le produit était trop cher? Une fois que les clients se sont prononcés sur un prix, il est difficile de changer leur avis.
Si Sony avait fixé des prix plus élevés et les avait progressivement baissés, cela aurait demandé un effort considérable et, plus important encore, du temps pour transmettre les baisses de prix. Compte tenu de la concurrence imminente et de la valeur des futures ventes de jeux, Sony a choisi de ne risquer aucun retard de vente. Maintenir le prix de 299 $ a permis à Sony d’atteindre une adoption maximale de sa plateforme. De plus, cette stratégie a permis de profiter de la couverture médiatique ; les reportages sur les pénuries et la frénésie du comportement d’achat ont accru la demande pour la console.
Visualiser sa stratégie de pricing en termes de valeur fournit une plateforme solide de croissance future. Vos produits actuels sont chargés de potentiel de croissance. Vous devriez toujours vous demander : “Quels sont les produits annexes que mes clients apprécieront ? » ou mieux encore, « Quelles options vont attirer de nouveaux clients ? ».
Ces produits annexes sont souvent moins risqués à créer et peuvent être encore plus rentables que votre produit principal. Pour obtenir des informations sur les opportunités de croissance, il suffit de demander aux clients : « Qu’est-ce que vous aimez ou n’aimez pas dans mon produit ? »
Jaguar, par exemple, a créé de la valeur pour les clients qui achètent les voitures d’occasion de l’entreprise. Il y a toujours une incertitude associée à l’achat d’une voiture d’occasion à cause des problèmes difficiles à détecter et de l’absence de garantie. En réponse à ces préoccupations, Jaguar a créé le Select Program : des voitures d’occasion certifiées, disponibles uniquement chez ses concessionnaires. Ces Jaguar d’occasion passent une inspection en 140 points, sont restaurées et viennent avec une garantie supplémentaire.
Ce programme populaire a créé de la valeur (entraînant des prix élevés) en réduisant les risques associés à l’achat d’une voiture d’occasion. Jaguar est un exemple de la façon dont la croissance peut être générée par la création de nouvelle valeur.
De nombreux clients considèrent les garanties comme un moyen d’avoir l’esprit tranquille.
Ces garanties sont des compléments très rentables aux produits de base d’une entreprise.
La Britain’s Consumer’s Association, une organisation indépendante dédiée à aider les consommateurs à faire des achats plus éclairés, a récemment réalisé une étude sur les extensions de garantie.
Les résultats sont surprenants. L’association constate que les garanties prolongées offertes par le groupe Dixons (N°1 des détaillant d’électronique en Europe) et Comet (une société d’électronique rivale) représentaient respectivement 47 % et 80 % de leurs bénéfices avant impôts.
De nombreux groupes d’intérêts des consommateurs critiquent les garanties prolongées. Les profits générés par celles-ci sont considérés comme une arnaque pour le consommateur. La réalité est que pour tout type d’assureur, la somme des frais de réparation doit être inférieure au total des primes reçues.
Ainsi, le consommateur moyen paiera plus en primes qu’ils ne recevront en versements. Ceci-dit, la décision d’acheter une extension de garantie devrait être basée sur la façon dont le consommateur utilise le produit.
Entre le consommateur qui construit son ordinateur de toute pièce et celui qui est anxieux d’ajouter simplement un nouveau logiciel, l’intérêt d’une garantie ne sera pas égal.
Pour ce dernier, savoir qu’un technicien viendra dans les 24 heures à son domicile s’il y a un problème, constitue une valeur ajoutée. Le fournisseur d’extension de garantie est toujours gagnant sur le plan monétaire, mais le consommateur y gagne en tranquillité d’esprit.
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